Mon histoire
C’est avec vulnérabilité, humilité, bienveillance, douceur, le cœur ouvert et rempli d’amour que je m’ouvre aujourd’hui dans le cadre de la World Childless Week pour partager un pan de mon histoire.
D’aussi loin que je puisse me souvenir, le désir d’avoir des enfants habitait le plus profond de mes tripes. Je n’en voulais pas un, ni deux mais trois. Cadette d’une famille aimante de trois enfants, je désirais reproduire ce modèle familial qui me convenait. La vie m’aura appris qu’il ne suffit pas de désirer des enfants, d’avoir un plan, de l’argent et ni même d’affronter les défis de la vie pour en avoir ou de prier tous les Saints. Oh non!
Divorcée et célibataire à l’âge de 38 ans et ne pouvant arrêter le temps d’avancer, j’ai mis un X sur mon désir de la maternité et de fonder une famille avec des enfants, devant l’évidence que mon corps, mon cœur et ma tête avaient atteint une limite de souffrance qu’il me fallait respecter. Mon désir de la maternité était grand mais il était hors de question pour moi qu’il se fasse au détriment de ma santé globale, en précipitant les choses pour trouver un nouveau conjoint ou même d’entreprendre seule des démarches d’insémination.
Plus spécifiquement, en mettant ce X sur mon désir, je ne voulais plus souffrir. Faisant partie des statistiques du 10% des cas inexpliqués, je me suis fait opéré pour l’endométriose pour mettre les chances de mon côté. Ceci n’étant pas suffisant, j’ai aussi subis des traitements de fertilité que j’ai trouvé douloureux. Par-dessus tout, ce qui m’a fait le plus souffrir était l’arrivée des règles après chaque heure/jours de retard qui m’avaient donné une lueur d’espoir. Ce projet de vie m’habitait jour et nuit pendant ces 5 années. Plus le temps passait plus je voyais mon espoir de devenir maman et d’élever une famille s’éteindre. Durant cette période, je n’en pouvais plus d’entendre les commentaires des gens tel que: ta sœur a eu cinq enfants tu vas y arriver aussi, cesse d’y penser ça va arriver au moment où tu ne t’y attend pas, essaye ceci, essaye cela, as-tu pensé à adopter? etc. Ces commentaires m’énervaient au plus au point et ils étaient surtout d’aucune aide pour moi. Plus le temps passait, plus je refoulais et m’isolais avec ma peine et ce que je vivais intérieurement. Avec du recul, je dirais que c’est la période de ma vie où je me suis sentie la plus seule et incomprise car je n’ai pas su exprimer mes limites, mes besoins, ni même oser demander de l’aide. J’étais frustrée et souvent en colère contre la vie que je trouvais si injuste à mon égard ayant la conviction que j’aurais été une bonne maman aimante. Lorsque l’on me posait la question fatidique : As-tu des enfants? Je répondais automatiquement en me justifiant craignant le jugement des autres et d’être perçue comme égoïste. J’ai compris plusieurs années plus tard que je pouvais projeter sur les autres le propre jugement que j’ai pu avoir dans le passé, sur des femmes ou hommes ne désirant pas avoir d’enfants alors que je ne connaissais pas l’histoire derrière. Au fond, j’avais du mal à accepter ma situation de femme sans enfant, à trouver ma place ainsi que ma valeur dans cette société valorisant tant la famille et la maternité.
Un jour j’ai eu la chance de découvrir Catherine-Emmanuelle Delisle la créatrice du groupe Facebook Femme sans enfant (par circonstance de la vie et par choix). Ce jour-là, j’ai pris conscience que je n’étais pas seule à vivre le deuil de la maternité, de la détresse et des biais de perception. À travers cette communauté, j’ai trouvé l’élan qui m’a aidé à sortir de l’isolement. En respectant mon rythme, j’ai commencé à m’ouvrir, à commenter, à participer à des événements (déjeuner avec d’autres FSE, partage de carte de noël, écriture dans le cadre de la World Childless Week) et même à m’inscrire à la formation du Centre de Relation d’Aide de Montréal pour devenir thérapeute en relation d’aide. À travers cette formation de trois ans dont je suis maintenant diplômée, plus d’une quinzaine d’année après avoir mis un X sur mon rêve de la maternité et cru que j’avais fait le deuil de la maternité, j’ai eu le choc de prendre conscience que mon deuil n’était pas encore totalement vécu. Je passe les détails qui ne sont pas pertinents ici pour partager l’enseignement que j’ai pu en retirer. En fait, j’ai compris que refouler et m’isoler a été pour moi une façon de survivre à ma souffrance et ne m’a pas permis d’accueillir mon vécu ni d’accepter et faire mon deuil, mais je n’en étais alors pas consciente jusqu’à tout récemment.
C’est seulement en prenant le temps de m’arrêter et de ressentir ce que j’avais refoulé que j’ai pu être sensible à moi pour ensuite oser m’ouvrir sur mon vécu à des personnes de confiance, et pleurer à chaudes larmes en toute sécurité pour libérer la peine refoulée toutes ces années. Pleurer ma peine, oser exprimer ce que je vis et ressens, être écoutée, comprise, accueillie avec douceur, bienveillance et empathie était tout ce dont j’avais besoin et que je n’ai pas su exprimer dans le passé.
Partager mon histoire dans le cadre de la semaine de la World Childless Week est pour moi une façon de m’offrir de la douceur, de l’empathie de m’accueillir et m’accepter. C’est également une occasion de voir le chemin parcouru dans mon processus de deuil, sans juger mon rythme, reconnaitre ma valeur comme FSE pour poursuivre mon chemin plus sereine et en harmonie intérieurement.
Si mon histoire amène une FSE à sortir de l’isolement ou une personne à réfléchir aux biais de perception, ce sera un bonus. Si vous avez été touché ou que vous croyez qu’elle peut faire du bien à quelqu’un n’hésitez pas à la partager.
Impossible pour moi de terminer sans exprimer ma reconnaissance à Catherine-Emmanuelle Delisle pour son dévouement à la communauté des FSE et la World Childless Week. Catherine-Emmanuelle tu as été pour moi une ressource clé et une inspiration à sortir de l’isolement.
Merci du fond du cœur ♥
Nathalie Desrochers